L’initiative pour l’autodétermination veut donner la priorité absolue à la Constitution fédérale. C’est-à-dire la placer au-dessus du droit international. La Suisse ne devrait alors uniquement respecter les normes impératives du droit international, notamment l’interdiction du génocide, de l’esclavage ou de la torture.
La Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) garantit les droits fondamentaux de tous les individus. Cette protection est particulièrement importante pour les personnes et groupes de personnes en marge de la société et qui peinent à se faire entendre. En cas d’acceptation de l’initiative pour l’autodétermination, le Tribunal fédéral n’aurait plus le droit de tenir compte de la CEDH pour rendre ses décisions.
Résultat: Une discrimination de personnes ou groupes de personnes serait dès lors possible en Suisse, droits de l’homme ou pas. Cela signifierait aussi que les droits fondamentaux individuels ne pourraient plus être revendiqués. La force d’un ordre démocratique se distingue justement par le fait qu’il reconnaît les droits de l’homme et qu’il autorise un droit de recours contre les violations éventuelles de la Constitution et des lois auprès de tribunaux supranationaux.
A l’avenir, par des décisions prises à la majorité lors de votations, les droits de l’homme pourraient être largement restreints. Les minorités n’auraient plus droit au respect.
A diverses reprises, la CEDH a eu un effet positif sur notre législation. Ainsi pour l’introduction du suffrage féminin ou la fin de l’«internement administratif» des mineurs. Pas plus tard que l’année dernière, sous la pression d’un jugement de la Cour européenne pour les droits de l’homme, la Suisse a introduit un nouveau mode de calcul de l’AI pour les personnes travaillant à temps partiel. L’impact est particulièrement positif pour les femmes vivant avec un handicap.
En 2016, la Cour européenne des droits de l’homme a tancé la Suisse en raison de l’absence de base légale pour la surveillance des assurés touchant des prestations des assurances sociales. Le Parlement a donc concocté en hâte une loi qui va au-delà du but recherché:
Les personnes en situation de handicap qui reçoivent une rente AI ainsi que des prestations complémentaires (parce que la rente ne suffit pas pour vivre) seraient touchées de façon disproportionnée par l’article sur la surveillance.
Les assurances disposeront de pouvoirs étendus. Des surveillances pourront être ordonnées sans autorisation judiciaire. C’est aussi la séparation des pouvoirs qui est ainsi levée: les assurances qui ordonnent une surveillance deviennent aussi partie d’une procédure.
Le délit d’abus de prestations sociales existe déjà. Une adaptation du Code de procédure pénale permettrait d’harmoniser les règles relatives à la surveillance. L’ordre de surveillance incomberait alors au ministère public et la surveillance se déroulerait dans le cadre du droit pénal. Là où elle a sa place.
L’intégration de l’article sur la surveillance des assurés dans le droit des assurances sociales laisse présager des conflits avec le code de procédure pénale, voire entre les détectives privés et la police. Imaginons: une personne se sent harcelée et suivie. Elle s’adresse à la police, laquelle intervient et commence à surveiller le détective privé chargé d’une surveillance par une caisse maladie, par exemple. Une situation absurde, qui serait pourtant possible en raison de l’article sur la surveillance.
L’utilisation frauduleuse de prestations sociales doit incontestablement être poursuivie. Mais la nouvelle base légale va trop loin, elle est intégrée au mauvais endroit et elle pousse les tenants d’une ligne dure à renforcer encore le droit des assurances sociales.
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